Ni Dieu, ni maître, une histoire de l'anarchisme - La mémoire des vaincus (1911-1945)

04Juin

documentaire - histoire

Au sortir de la Première Guerre mondiale, dans une Europe exsangue, l'anarchisme semble avoir perdu l'essentiel de son influence. Mais les révolutions mexicaine, puis russe, ont vu appliquer ses mots d'ordre à une échelle inédite, même si l'échec de la première, et la prise du pouvoir par les bolcheviks à Saint-Pétersbourg pour la seconde, ont rejeté à nouveau parmi les vaincus des milliers de ses militants. Dans cet entre-deux-guerres où, très vite, les totalitarismes fasciste et soviétique se font face, l'anarchisme reste fort en Amérique. En 1927, l'exécution des deux militants Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti suscite une immense réprobation des deux côtés de l'Atlantique. Puis, au printemps 1936, l'élection en Espagne d'un gouvernement de Front populaire va permettre aux anarchistes d'écrire l'une des pages les plus marquantes de leur histoire.

 

Critique : Les avis sont partagés Pour « La propriété, c'est le vol ! » Publiée en 1840 par le penseur français Pierre-Joseph Proudhon, cette assertion iconoclaste a signé l'avènement de la pensée anarchiste. Elle est aussi le point de départ de ce documentaire en deux parties, dont l'ambition est de balayer, de 1840 à 1945, les différentes facettes d'un mouvement politique protéiforme. Le premier volet, La volupté de la destruction, 1840-1914, expose les bases théoriques de l'anarchisme, né en réaction à la révolution industrielle du xixe siècle et au capitalisme naissant. Avec un grand souci didactique, le film détaille les premières dissensions et les premiers errements de ce courant de pensée dans son application sociale et politique : pour lutter contre toute forme de domination — qu'elle soit étatique, économique ou religieuse —, pour renverser le pouvoir et détruire les fondements de l'ordre social, faut-il prôner l'insurrection ? Utiliser l'arme de la grève générale ? Dépasser les limites du discours et poser des bombes ? S'il s'est beaucoup subdivisé, le mouvement anarchiste a aussi initié quantité d'avancées sociales : cette première partie évoque la création des Bourses du travail, la journée de huit heures, la lutte pour les droits des femmes, et même un retour à la nature, ancêtre de l'écologie... Plus confus, le deuxième volet, La mémoire des vaincus, 1911-1945, raconte les tentatives révolutionnaires (Mexique, Russie) qui ont marqué le début du xxe siècle, visant à montrer que l'anarchisme est bien un mouvement international — il s'éteindra néanmoins, pour un temps, dans le fiasco de la guerre d'Espagne. Le film (trop ?) dense fourmille d'archives inédites ; il donne la parole à des historiens dont beaucoup sont, eux-mêmes, proches de la pensée libertaire. Et si l'on peut reprocher à son commentaire une empathie manifeste et des envolées lyriques, reconnaissons à Tancrède Ramonet le mérite d'avoir exploré un pan méconnu de l'histoire politique. — Perrine Dutreil   Contre Tenter de faire connaître une pensée et un mouvement protéiformes et par trop ignorés était une bonne idée ; mais fallait-il la traiter ainsi ? Plutôt que d'en explorer certains aspects en profondeur, Tancrède Ramonet traverse au pas de charge un siècle d'histoire intellectuelle, politique et sociale. Au caractère étouffe-chrétien de son documentaire s'ajoute un conformisme esthétique corseté, en contradiction avec certaines valeurs qu'il prétend promouvoir — alternance d'interviews d'experts (tout éloquents qu'ils soient) et d'archives commentées, traversées de musiques stressantes. Des coups d'archet tranchants de son générique d'ouverture à l'agressivité de la chanson accompagnant son générique de fin, Ni dieu ni maître témoigne d'une forme d'autoritarisme qui ne nous laisse aucun répit. — François Ekchajzer

 

Diffusion : Le 04 Juin 2017 à 22:00

 

Replay : Disponible prochainement ...

 

Commentaires

Ce soir